Une experte québécoise explique ce qu'il faut savoir sur le nouveau variant de la COVID-19
Bien que le variant plus contagieux de la COVID-19 détecté au Royaume-Uni ne soit pas encore au Canada, certains s'inquiètent.
Pour discuter de cette nouvelle souche, Narcity Québec s'est entretenu avec Sandrine Moreira, responsable des études génomiques de la COVID-19 au laboratoire de santé publique du Québec (LSPQ). Voici donc ce qu'il faut savoir sur cette mutation du nouveau coronavirus qui fait les manchettes dernièrement.
La mutation d'un virus est-elle normale?
« C’est absolument normal », assure Mme Moreira, affirmant que ces variants sont causés par des erreurs.
La responsable des études génomiques du LSPQ explique que lorsque le virus se multiplie à l’intérieur d’un corps humain et qu’il est transmis, il recopie son matériel génétique.
En se recopiant, il crée ainsi des erreurs, des mutations qu’on appelle aussi variants.
« Le premier virus détecté et séquencé en Chine, dont on a déterminé le contenu génétique, est notre modèle de référence », raconte-t-elle.
Ainsi, tous les nouveaux virus qui seront isolés de patients sont comparés à cette souche de référence.
Mme Moreira explique qu'il pourrait donc y avoir une vingtaine de différences du virus initial dans la séquence génétique du virus d’une personne qui contracte la COVID-19 aujourd’hui.
À titre indicatif, la souche du premier Québécois à avoir contracté le nouveau coronavirus détenait une dizaine de mutations, mentionne la scientifique.
Que sait-on du variant britannique?
Bien que les mutations d’un virus puissent être silencieuses, d’autres peuvent avoir un impact sur la fonction du virus, comme au Royaume-Uni.
Le variant anglais, selon les données préliminaires, semble être de 40 à 70 % plus contagieux et représente la majorité des cas en Angleterre, alors qu’il n’a été identifié qu’au mois de septembre.
Enentrevue à la BBC, le ministre de la Santé britannique, Matt Hancock, a mentionné que le nouveau variant du coronavirus était « hors de contrôle ».
Par contre, un variant plus contagieux n’est pas nécessairement plus alarmant, mentionne Mme Moreira. Elle affirme que certains virus plus transmissibles sont associés à un virus moins dangereux, moins néfaste.
Pourquoi avoir attendu en décembre s'il a été identifié en septembre?
« Le problème », explique Sandrine Moreira, « c’est qu’au début, c’était un variant qui aurait pu être ordinaire. »
Toutefois, « avant de voir qu’il était plus contagieux, il faut lui donner l’opportunité de se transmettre », raconte la scientifique.
Dans les faits, tant que le variant détecté n’a pas pris le pas sur les autres souches, il n’est pas possible d’y mettre l’étiquette de « plus contagieux ».
« C’est seulement lorsqu’on a vu un accroissement anormal du nombre de porteurs de ce virus-là que les scientifiques anglais se sont dit : il se passe peut-être quelque chose », précise-t-elle.
« Mais on ne lève pas l’alerte à chaque découverte d’un nouveau variant », avance Mme Moreira.
Est-ce que ce nouveau variant est seulement au Royaume-Uni?
Comme le confirme l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le variant anglais de la COVID-19 a été détecté dans plusieurs pays, dont en Australie, au Danemark, en Italie, en Islande et aux Pays-Bas.
Selon les dernières informations, il n’y aurait pas pour l’instant de cette souche anglaise aux États-Unis et au Canada, affirme Mme Moreira.
Y a-t-il des craintes à avoir pour le Canada?
« Ce que l’on craint surtout, c’est que des souches détectées en Angleterre se transmettent par l’intermédiaire de voyageurs jusqu’au Canada », souligne-t-elle.
Au début de la pandémie, les premiers Québécois infectés à la COVID-19 présentaient des souches provenant principalement d’Europe (Angleterre et la France), des États-Unis et des Caraïbes/Amérique latine.
Selon Sandrine Moreira, plusieurs imports ont eu lieu après la semaine de relâche et les voyageurs ont rapporté la souche locale au Québec.
« Très, très peu de souches ont été importées de Chine », martèle-t-elle.
Alors que plusieurs Québécois comptent fuir le froid et se reposer au soleil durant les Fêtes, malgré la non-recommandation des gouvernements, Mme Moreira avoue que la situation l’inquiète.
« Ça m’effraie [...], en particulier si un variant peu être plus contagieux », confie-t-elle.