C'est ce mercredi 26 janvier 2022 que se tient la journée Bell Cause pour la cause. Cette campagne philanthropique annuelle de Bell bénéficie d'une médiatisation importante et est souvent saluée pour briser les tabous sur la santé mentale.
Cependant, des organismes spécialisés et des regroupements de médecins affirment que l'engagement de Bell pour cette cause ne se reflète pas dans sa programmation et ses opérations.
Debout l\u00e0-dedans! Aujourd\u2019hui commence la Journ\u00e9e Bell Cause pour la cause! Faites attention de ne pas vous rendormir - joignez-vous \u00e0 la conversation et ensemble faisons en sorte que chaque geste compte. #BellCausepic.twitter.com/Ehmxh24PM4— Bell Cause (@Bell Cause) 1643198406
Bell Cause, c'est quoi?
Bell Cause est un engagement philanthropique de Bell Canada. Selon les informations disponibles sur leur site Web, l'entreprise verse 5 cents de plus à des initiatives canadiennes en santé mentale pour chaque message texto, chaque tweet ou vidéo TikTok utilisant le mot-clic #BellCause ainsi que chaque visionnement de la vidéo sur les médias sociaux et l'utilisation du filtre Snapchat de réalité augmentée lors de la journée BellCause. Au moment de consulter leur site Internet, il y avait 79 438 479 « interactions ».
À travers le Fonds communautaire Bell Cause, l'entreprise indique qu'elle verse des dons allant de 5 000 $ à 25 000 $ à des projets qui contribuent à l'amélioration de l'accès aux soins, aux programmes de soutiens et aux services en santé mentale au Canada. Le Fonds diversité de cinq millions de dollars soutient « la santé mentale et le bien-être des communautés des personnes noires, autochtones et de couleur partout au Canada ». Le Fonds postsecondaire Bell Cause s'engage, quant à lui, dans les universités et les collèges du Canada.
L'émission Huissiers
Des organismes sont revenus à la charge pour réclamer, lors d'une conférence de presse tenue le lundi 24 janvier, le retrait de l’émission Huissiers de la grille horaire de la chaîne Noovo, puisqu’elle contribue à « mettre en spectacle la misère humaine ». Une pétition à cet effet a maintenant dépassé les 2 600 signatures.
Le programme diffuse des interventions de huissier.ères chez des personnes pendant une éviction ou une saisie de biens. Selon Noovo, la mission de l'émission est de présenter « ce métier souvent mal compris et mal aimé ».
Les organismes en santé mentale qui ont organisé l'événement se sont dits « inquiets et interpellés » par Huissiers. Selon eux, l'émission met l'accent sur la détresse et a des conséquences néfastes sur la dignité des personnes concernées.
« Huissiers profite de moments d’extrême vulnérabilité des personnes évincées [pour] soi-disant sensibiliser » à leur métier, selon Catherine Marcoux du RAPSIM.
Ces ressources en santé mentale dénoncent l'« intrusion [d'un] show télé qui traumatise les personnes qui se retrouvent filmées et exposées ».
« Quand on vit de la détresse, on a besoin de soutien. Pas d'une caméra qui vient bouleverser davantage nos vies », ajoute Carole Lévis, du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec.
« Pensez un peu à la famille, aux gens proches, la honte qu’elles subissent. C’est devenu un spectacle », souligne Solange Laliberté, une représentante de l'Association pour la Défense des droits sociaux du Montréal métropolitain (ADDS MM).
La représentante de l'ADDS MM avance que les gens présentés dans l'émission ne comprennent pas les formulaires qu'ils signent et ne comprennent pas que ces formulaires impliquent une médiatisation suite au passage d'un.e huissier.ère chez eux. Elle déplore que l'équipe de l'émission de télévision se présente sans prévenir.
Au moins une personne s'est retrouvée en situation d'itinérance après le passage de l'équipe de production, révèlent ces organismes.
« Le logement et l’accès à un revenu décent sont des droits et les chemins vers l’itinérance ne devraient en aucun cas être un spectacle », rappelle Catherine Marcoux du RAPSIM.
La compagnie de production Pixcom, qui produit l'émission, est visée dans au moins une poursuite civile au Palais de justice de Montréal.
« Philanthrocapitalisme »
Le regroupement Médecins québécois pour le régime public (MQRP) fait quant à lui une critique sociale plus générale visant à dénoncer le « philanthrocapitalisme ». D'après cette association, le pouvoir démocratique perd des plumes face aux intérêts privés.
Selon le MQRP, « il n’est simplement pas souhaitable que des soins dépendent des intérêts médiatiques et commerciaux d’entreprises privées ».
Ils considèrent que la campagne de Bell est une opération de relations publiques.
« La compagnie Bell Canada s’attire un capital de sympathie important avec cette campagne publicitaire. Il faut se rappeler qu’il ne s’agit que d’une image », estime le MQRP.
« Où était Bell Canada sur la scène publique lorsque les coupures en santé mentale ont été annoncées par le gouvernement libéral et où était Bell Canada lorsque les organismes ont fait front commun pour dénoncer le manque de financement criant en santé mentale? », ajoute l'association.
Narcity a contacté Bell Canada pour avoir un commentaire au sujet de ces critiques. Cet article sera mis à jour lors d'une réponse.
À noter que l'écriture inclusive est utilisée pour la rédaction de nos articles. Pour en apprendre plus sur le sujet, tu peux consulter la page du gouvernement du Canada.