La baisse d'impôt divise au Québec et des experts nous expliquent le pour VS le contre
Le budget 2023-2024 du gouvernement du Québec n'a pas fini de faire des vagues. Au centre des discussions, la fameuse baisse d'impôt promise par la Coalition Avenir Québec (CAQ) semble diviser les économistes. L'amélioration de la qualité de vie passe-t-elle par des réinvestissements dans les services publics ou par la diminution des charges fiscales?
Pour t'aider à te faire une idée sur ces enjeux, Narcity a demandé l'avis de la chercheuse à l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS), Julia Posca, ainsi qu'à Renaud Brossard, porte-parole de l'Institut économique de Montréal (IEDM). Alors que leurs visions sont diamétralement opposées, iels expriment leurs points de vue sur différents aspects de cette nouvelle mesure budgétaire.
L'impact des baisses d'impôt
Selon l'IRIS, la stratégie gouvernementale de diminuer le fardeau fiscal finit par priver ce dernier des sommes nécessaires pour adresser les différentes crises, qu'il s'agisse de la climatique, celle des services publics ou encore celle du logement. « C'est la troisième baisse d'impôt en cinq ans. Avec cette nouvelle mesure, on est au-dessus de quatre milliards dont on se prive pour les services à la population », d'après ce qu'indique Mme Posca.
Pour l'IEDM, l'impact de la fiscalité sur la croissance de l'économie de la province doit aussi être pris en compte. « Le Québec demeure la juridiction la plus taxée du continent et le sera encore après les baisses d'impôt », affirme Renaud Brossard. « Les impôts peuvent avoir un effet de découragement sur les investissements puisque c'est plus long avant qu'ils soient rentables », explique-t-il.
La répartition de la baisse d'impôt
Un autre point de discorde vient sur la répartition de la baisse d'impôt. « Les personnes qui reçoivent les plus gros montants, ce sont celles qui ont un revenu de 100 000 $ alors qu'on peut croire qu'elles n'ont pas besoin de ce coup de pouce », dénonce Julia Posca. Alors que la réponse offerte est généralement que cet argent sera réinjecté dans l'économie et reviendra sous forme de taxes à la consommation, la chercheuse n'en démord pas. « Le problème n'est pas que les gens consomment, mais plutôt qui consomme », lance-t-elle.
« Si on donne 800 $ à quelqu'un qui gagne 100 000 $ par année, elle va pouvoir le dépenser pour s'acheter des biens non essentiels, des biens de luxe, éventuellement peut-être placer cet argent-là. Contrairement à si vous le donnez à quelqu'un qui gagne un bas salaire et que ça peut lui permettre de faire de meilleurs choix à l'épicerie, de ne pas être contraint, [...] ou de faire une sortie avec ses enfants parce que normalement cette personne va se priver parce qu'elle a aucun coussin. C'est donc plus utile d'aider une personne à bas revenu et elle va tout autant stimuler l'économie. [...] Le problème c'est qu'elle est mal ciblée, cette baisse d'impôt. »
Pour sa part, Renaud Brossard rejette l'idée que cette baisse des impôts favorise de facto les personnes les plus aisées de la société. « 90 % des gens qui vont bénéficier de cette mesure gagnent moins de 100 000 $ », affirme-t-il. Bien que la part brute épargnée par les plus riches est plus élevée, il s'agit, selon lui, d'une notion d'équité considérant que ces personnes payent déjà plus d'impôts.
« Le gouvernement baisse les deux premiers paliers d'imposition donc ceux qui touchent directement la classe moyenne », tranche le porte-parole de l'IEDM. Il ajoute ne pas connaître grand monde dans la classe moyenne qui refuseraient de prendre 370 $.
Au final, Julia Posca donne au plan budgétaire annoncé une note de 5/10. « Je ne lui donne pas la note de passage. Le budget a l'air à première vue responsable, mais offre peu pour répondre aux problèmes les plus urgents. »
« On parle ici d'un bon budget. Il y a des baisses d'impôt au moment où les Québécois en ont besoin. Par contre, le ministre perd des points sur la question du déficit », affirme plutôt Renaud Brossard qui lui attribue 7,5/10.
Alors que les deux spécialistes en économie bénéficieront d'une baisse d'impôt, Julia Posca pense en faire don à un organisme venant en aide aux personnes démunies. « Ce serait probablement une manière intelligente de l'utiliser », dit-elle. De son côté, Renaud Brossard entend la mettre de côté pour s'offrir un condo ou une maison dans le futur.
À noter que l'écriture inclusive est utilisée pour la rédaction de nos articles. Pour en apprendre plus sur le sujet, tu peux consulter la page du gouvernement du Canada.