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Chère maman blanche,
J’espère que tu vas bien. J’ai longtemps hésité à t’écrire cette lettre, de peur de te blesser, de te faire douter ou encore, de te déstabiliser… C’est sans doute parce que je sais à quel point le rôle d’une mère peut être difficile, complexe, laborieux et très émotif. Je sais également que chaque maman qui aime ses enfants fait de son possible au meilleur de ses capacités et de ses connaissances.
C’est la raison pour laquelle, je prends le temps aujourd’hui d’ouvrir une conversation sur l’importance du rôle crucial que tu tiens dans la construction de l’identité de ton enfant adopté, noir ou mixte. L’objectif ici est d’ouvrir les horizons, peut-être de t’outiller et surtout, de comprendre les réalités et les enjeux corporels de l’enfant que tu élèves dont certains sont complètement différents des tiens.
Diversité capillaire
Si la vie t’a amené le magnifique cadeau du ciel d’un enfant à la peau ébène ou caramel et à la tignasse frisée, il est important de saluer et de reconnaître sa différence.
Et ça commence par ses cheveux. Oui, oui, ses cheveux. Ils ne sont pas comme les tiens. Ils ne se lavent pas, ne se coiffent pas, ne se traitent pas, ne poussent pas, ni ne se soignent comme ta chevelure.
C'est dans le livre Peau Noire, cheveu crépu : L'histoire d'une aliénation que j'ai compris comment la couleur de peau et la chevelure façonne la construction identitaire. Cela peut paraître futile, mais le fait de ne pas céder à la pression des standards de beauté eurocentriques, c'est d'embrasser sa culture, ses origines et son histoire.
Savais-tu qu’il existe quatre types de boucles? Qu’il faut déterminer le type du cheveux afro selon la forme, la texture, la densité, le volume, le sébum et la porosité pour une chevelure en santé? Est-ce que tu sais ce qu’est une coiffure de protection? Connais-tu l'existence du mouvement Nappy?
Si tu ne sais rien de tout ça, je t’invite à continuer cette lecture.
Mon salon de coiffure est souvent le théâtre de mamans blanches parfois impatientes, découragées ou maladroites, mais souvent fascinées par l’univers du cheveu afro.
Le personnel du salon de coiffure ethnique Achaïa Select en a vu de toutes les couleurs, pour ne pas faire un mauvais jeu de mots.
L’une des stylistes m’a confié qu’une mère amène régulièrement son garçon métisse de huit ans au salon pour raidir ses magnifiques boucles à l’aide d’un défrisant chimique.
« Il n’avait que cinq ans la première fois qu’il s’est assis sur ma chaise. Les autres coiffeuses me dévisagent [lorsque je commence le traitement], car elles savent que le défrisant peut être abrasif pour le cuir chevelu et que c’est déconseillé pour les jeunes enfants. Toutefois, le petit garçon insiste pour ressembler à sa mère et elle abdique », me raconte-elle, l’air désolée.
Selon cette spécialiste du cheveu de type afro, plusieurs mères optent pour cette option afin de se « faciliter » la vie, car elles n’ont pas acquis le savoir de coiffer les boucles tissées serrées.
En 2022, une étude des National Institutes of Health aux États-Unis (NIH) dévoilait ceci : les femmes qui utilisent des produits chimiques pour lisser leurs cheveux sont plus à risque de développer un cancer de l'utérus. Je dis ça, je ne dis rien. Et devinez quoi? Toutes les femmes noires de mon entourage sont déjà passées par là.
Cela est sans compter les mauvais traitements infligés aux cheveux crépus. « Une autre maman lavait tous les jours les cheveux de sa fille adoptée et la petite est venue avec les cheveux tellement secs et mêlés. Il m’a fallu quatre heures pour la coiffer et elle a perdu la moitié de la densité de sa chevelure », me relate-t-elle.
Ces histoires m’attristent, car je ne peux compter le nombre de fois où j’ai remarqué des mômes noirs avec des parents blancs, dont les cheveux ressemblaient à une « motte » de terre mêlée sur la tête.
Chère maman blanche, forcer un enfant à se défriser les cheveux ou ne pas prendre le temps de connaître les soins adéquats, c’est d’inconsciemment adhérer à l’effacement de la moitié de son individualité et de faire abstraction à ses origines noires.
Si moindrement tu tiens à la beauté de sa différence capillaire (soit l’un des attraits les plus caractéristiques de sa mixité), pourquoi ne pas commencer par s’y intéresser, de montrer une curiosité et même une certaine affection, car il s’agit tout de même de ta progéniture. Il ne faut surtout pas se montrer intimidée ou embarrassée à demander de l’aide de spécialistes dans un salon de coiffure ethnique. Au contraire! Beaucoup d'entre elles sont également mamans et quelles que soient leurs origines, elles ont toutes à coeur le bien des enfants.
Il faut juste savoir, chère maman blanche, que pour n’importe quelle personne noire, les cheveux sont un symbole de force, de fierté et d’identité. Trop longtemps, les afros, les tresses, les boucles ont été ridiculisés. Et aujourd’hui, on ne veut plus contribuer à cette honte de ne pas fit in dans les standards de beauté de la société, soient des cheveux droits, pâles et longs.
Diversité cutanée
S’il y a diversité capillaire, il y a également diversité cutanée. Maman blanche, sais-tu donc que la peau noire nécessite des besoins qui sont divers des tiens?
Justement, l’excellente série dramatique This Is Us illustre cette ignorance sur ces diverses caractéristiques.
Cette famille américaine blanche adopte un bébé noir et un jour, à la piscine, leur fils se plaint de graves démangeaisons. Une maman noire qui l’observait de loin s’est approchée de la famille et a proposé une lotion hydratante pour apaiser l’épiderme totalement déshydratée par le chlore.
Eh oui, en général, les peaux noires et métissées ont tendance à s’écailler après un lavage ou une baignade. Vive la déshydratation! Je ne sais combien de fois ma mère m’a badigeonné de beurre de karité pour éliminer ma peau de crocodile!
Puis, à l’adolescence, si les hormones attaquent le visage de ta fille ou de ton garçon de vilains boutons, il est normal de remarquer que la peau noire tache beaucoup plus que la peau blanche. C’est le phénomène de l’hyperpigmentation. C’est spécifique à notre type de carnation.
Et si tu amènes ton ado chez le dermatologue, il se peut qu’il.elle ne sache même pas diagnostiquer tous les problèmes reliés à la peau de ton kid, car le manque de représentativité et de recherche est aussi un enjeu sérieux dans le domaine médical. En fait, très peu d’illustrations représentent les peaux mates ou noires et c’est une des raisons pour lesquelles nous sommes susceptibles à recevoir un sous-diagnostic ou un mauvais traitement.
Dieu merci, aujourd’hui, en ligne, il existe plusieurs types de documentations sur la question pour t’aider à comprendre la diversité cutanée… Il ne te suffit que de quelques clics pour t’éduquer sur la question et te rendre compte que l’ADN que porte ton enfant est un monde riche et dense.
Les ressources à Montréal et aux environs
Pour finir, chère maman blanche, je te fournis quelques références dans le Grand Montréal pour t’équiper, consulter, t’instruire ou même prendre des cours pour coiffer des cheveux de type afro et la peau mate, mixte ou noire.
