Loi 2 : Tout ce que tu dois savoir sur la loi sur la rémunération des médecins du Québec
Le 25 octobre dernier, le gouvernement de François Legault a adopté sous bâillon (et au petit matin) la nouvelle loi 2, une loi spéciale menant une réforme de la rémunération des médecins du Québec. Depuis des mois, les différentes fédérations médicales de la province ont contesté leur fort mécontentement. On t’explique l’ABC de cette nouvelle législation qui cause bien émois.
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C’est dans un contexte d’impasse avec les fédérations des médecins spécialistes (FMSQ) et des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) que le gouvernement Legault a choisi de faire adopter la loi sous bâillon, a expliqué au Salon rouge le ministre de la Santé, Christian Dubé, le week-end dernier.
« L’état actuel de notre système de santé nous impose d’agir de façon urgente, a-t-il dit. Nous avons la responsabilité d’agir pour les patients de façon durable. »
Qu'est-ce que la Loi 2?
D’abord, commençons par son titre officiel : Loi 2, Loi visant principalement à instaurer la responsabilité collective quant à l’amélioration de l’accès aux services médicaux et à assurer la continuité de la prestation de ces services.
Il s’agit grosso modo d’une loi spéciale qui revoit de fond en comble la manière dont les médecins de la province sont rémunéré.e.s.
Avec cette nouvelle loi, les médecins ne pourront plus mener des « actions concertées » pouvant nuire à l’accès aux soins de santé et à la formation de la communauté étudiante des facultés de médecine, sous peine d’amendes salées.
Cette mesure a été pensée, alors que les médecins spécialistes et omnipraticien.ne.s ont mené.e.s dans les derniers mois des moyens de pression incluant la suspension de l’enseignement aux étudiant.e.s en médecines.
Comment a été adoptée la Loi 2?
Il faut dire que la Loi 2 découle en bonne partie du projet de loi 106, déposé en mai dernier par le ministre de la Santé, Christian Dubé. C’est ce même projet qui avait plongé Québec et les deux fédérations médicales dans de longues et ardues négociations.
Pour en sortir, le gouvernement Legault a donc présenté une loi spéciale de 120 pages, la Loi 2, le vendredi 24 octobre dernier. Elle a finalement été adoptée dans la nuit de vendredi à samedi, un peu avant 4 h du matin.
L’adoption sous bâillon s’est faite en présence de Christian Dubé et du premier ministre François Legault, par un vote de 63 voix contre 27.
Le terme « bâillon » signifie que le gouvernement peut adopter une loi en limitant le temps des débats et accélérer son adoption.
Comment la Loi 2 affectera-t-elle la rémunération des médecins?
Le paiement à l’acte sera maintenant (presque) chose du passé pour les médecins du Québec, indique une fiche technique gouvernementale. À partir de 2026, les médecins du Québec seront rémunéré.s selon un modèle qui mise sur la performance et la responsabilisation.
La rémunération à l’acte ne sera plus la seule mesure de paiement : le gouvernement introduit une formule mixte qui combine un forfait annuel par patientes et patients inscrit.e.s à leur charge et leur niveau de vulnérabilité (capitation), un taux horaire pour certaines tâches cliniques et une portion variable liée aux résultats obtenus.
La vulnérabilité des patient.e.s sera évaluée à l’aide d’un code de couleurs, du vert au rouge, où les personnes les plus vulnérables, classées en rouge, rapporteront une rémunération plus élevée.
Jusqu’à 10 % du revenu d’un.e médecin sera retenu et redistribué s’il ou elle atteint les cibles qui lui seront soumises, comme l’amélioration de l’accès aux soins, la rapidité des suivis et la qualité des services.
Ce nouveau système, officialisé par la Loi 2, sera déployé progressivement jusqu’en 2027, en parallèle avec l’affiliation complète de la population à un milieu de pratique.
La rémunération des médecins de famille comprendra un taux horaire, des suppléments pour certains services et un paiement par capitation.
Selon la FMSQ, la suppression du supplément versé lors d’une première consultation mènerait à une perte salariale de 30 à 50 % pour certain.e.s spécialistes.
Quelles sont les sanctions prévues?
La personne qui osera contrevenir à la Loi 2 pourrait faire face à une amende des plus salées, notamment en ce qui a trait au bris de service.
Les amendes pourront grimper entre 100 000 $ et 500 000 $ pour les fédérations ou associations fautives, 140 000 $ pour leurs dirigeantes et dirigeants, et 20 000 $ pour un.e médecin qui enfreint la loi. En cas de récidive, les montants seront doublés.
Un médecin qui participe à une action concertée interdite d’au moins trois personnes verra aussi son nombre d’années de pratique réduit d’une demi-année par jour de participation. Le Collège des médecins du Québec (CMQ) pourra imposer des sanctions disciplinaires allant de l’amende à la radiation.
Les fédérations reconnues coupables verront pour leur part leurs cotisations syndicales suspendues pendant douze semaines pour chaque jour de manquement.
La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) et Santé Québec seront en mesure de récupérer les sommes impayées, tandis que les bénéficiaires lésé.e.s pourront intenter des poursuites judiciaires.
Même les universités devront rendre des comptes si elles n’assurent pas la continuité des activités d’enseignement et de recherche.
Des « chiens de garde » pour s'assurer du respect de la loi 2
Le projet de loi prévoit la mise en place d’un système de suivi de l’assiduité et des services dans les milieux de pratique désignés par le gouvernement.
Chaque semaine, la personne responsable des activités professionnelles devrait dresser une liste détaillée précisant, pour chaque jour, le nom des médecins, leurs activités prévues ainsi que le lieu et l’heure de leur travail.
Un.e surveillant.e pourrait être désigné.e pour veiller au respect de ces activités et relever tout manquement. En cas d’absence ou de non-respect de l’horaire, il devra appliquer les mesures prévues par la loi.
Selon la Loi 2, cette personne pourra se présenter en tout temps dans le cabinet d’un.e médecin et exiger l’accès à tout document pertinent, y compris ceux liés au dossier d’une patiente ou d’un patient.

